Direction d’école : la loi Rilhac n’arrange rien, au contraire !

C’est un fait : d’année en année, et encore plus avec la crise sanitaire et ses multiples protocoles, les conditions de travail des directeurs d’écoles deviennent intenables !

La réponse de l’Etat se caractérise par le projet de loi Rilhac créant la fonction de directrice ou de directeur d’école voté à l’Assemblée Nationale en 1ère lecture le 24 juin 2020, puis au Sénat le 10 mars 2021. Est-il de nature à améliorer les choses ? C’est tout le contraire ! Jugez vous-même :

Une responsabilité accrue

Aujourd’hui :
La directrice ou le directeur d’école est un enseignant qui a une fonction particulière dans l’école.
Il/elle « veille à la bonne marche de l’école et au respect  de  la  réglementation  qui   lui   est   applicable » (décret de 1989).
Le responsable des écoles de circonscription est l’IEN qui en a la charge.

Avec le projet de loi Rilhac :
La directrice ou le directeur « dispose d’une autorité fonctionnelle permettant le bon fonctionnement de l’école et la réalisation des missions qui lui sont confiées. »
De plus, il/elle « administre l’école et en pilote le projet pédagogique ».
La responsabilité pénale de l’école repose uniquement sur les épaules des directrices et directeurs d’école.

Des tâches supplémentaires le transformant en supérieur hiérarchique

Aujourd’hui :
La demande des personnels est de diminuer le nombre de tâches que l’administration continue d’ajouter au gré des réformes et autres situations sanitaires.
Les personnels demandent notamment le respect des missions des directeurs d’école (décret de 1989).

Avec le projet de loi Rilhac :
La directrice ou le directeur d’école « bénéficie d’une délégation de compétences de l’autorité académique pour le bon fonctionnement de l’école qu’il dirige. »
Cela signifie que les directeurs d’écoles vont devoir accomplir des tâches supplémentaires car les IEN vont leur transférer une partie de leurs missions. Lesquelles ? Pour l’instant, la loi ne le prévoit pas. Le ministre aura donc les mains libres pour préciser dans ses décrets et circulaires de quelle nature sera cette « délégation de compétences » et cette « autorité fonctionnelle ».

Exemples de missions supplémentaires avec la synthèse des ateliers du Grenelle :

  • Evaluation des enseignants : « la directrice d’école ou le directeur d’école serait associé à l’évaluation dans le PPCR avec l’IEN sur les aspects administratifs, organisationnels et fonctionnels. »
  • Participation au recrutement des adjoints dans les écoles : « Il serait possible de concilier le mouvement infra départemental avec quelques postes à profil en adéquation avec des projets d’école particuliers et associer le directeur d’école au recrutement. »

Un bouleversement du fonctionnement de l’école publique soumis aux élus locaux !

Aujourd’hui :
Les décisions sont prises au sein des conseils des maîtres et arrêtées par la directrice ou le directeur d’école (répartition des classes, des élèves, services de surveillance, …).
Ces décisions sont présentées au Conseil d’école pour « informer » les parents d’élèves et les élus locaux.

 Avec le projet de loi Rilhac :
Il est indiqué que « Le directeur de l’école préside le conseil d’école qui réunit les représentants de la communauté éducative, entérine les décisions qui y sont prises et les met en œuvre. »
Ainsi le conseil d’école, où siègent les élus locaux, où les enseignants sont minoritaires, pourrait désormais prendre des décisions ! Jusqu’où pourraient aller ces décisions ?
En tout état de cause, cette disposition soumettra d’autant plus les directeurs d’écoles à la pression des municipalités !

Que dit la synthèse du Grenelle sur le fonctionnement de l’école ?

La volonté du ministre est de bouleverser la structure et le fonctionnement mêmes de l’école publique.

En effet, pour le Grenelle, il faudrait « Renforcer le conseil d’école comme levier de l’expression du pilotage par l’équipe autour de la directrice, directeur d’école en donnant plus de pouvoir délibératif aux conseils d’écoles » allant jusqu’à écrire « La gestion d’une enveloppe spécifique pourrait être confiée au conseil d’école, le directeur d’école se voyant ainsi chargé du respect des décisions prises par le conseil. »

La délégation de compétences et l’autorité fonctionnelle mises en place par le projet de loi Rilhac sont donc des outils qui pourront permettre au ministre d’avancer vers son objectif : créer des directeurs supérieurs hiérarchiques chargés d’évaluer voire de recruter leurs collègues ! Rappelons que le ministre entend supprimer les IEN dès 2022 en les fusionnant avec les IA-IPR du 2nd degré et en restreignant leurs tâches à l’accompagnement pédagogique !

Est-ce un hasard si de plus en plus de postes de directeurs sont fléchés, permettant aux IA-DASEN de choisir les directeurs en dehors de tout critère de barème ?

Le ministre tente donc de mettre en place un changement radical du fonctionnement des écoles qui sera introduit par ce projet de loi Rilhac , à l’image des établissements du 2nd degré.

Et maintenant, que faire ?
Prenons position dans nos écoles pour l’abandon de ce projet !

Les dispositions du projet de loi Rilhac ne répondent par ailleurs à aucune des revendications des directeurs d’école en termes d’augmentation des quotités de décharge, d’amélioration indiciaire significative de mise en place d’une aide administrative statutaire !

Personne, ni les directeurs, ni les adjoints, ni les AESH n’a intérêt à ce que le projet de loi Rilhac ne soit voté. Le SNUDI-FO en demande l’abandon, avec l’intersyndicale SNUipp-FSU, CGT Educ’action, SUD Education.

Il invite les personnels à exprimer cette exigence sous toutes les formes possibles (motions, courriers…). Le SNUDI-FO continue à proposer aux autres organisations syndicales une initiative nationale pour le retrait du projet de loi Rilhac.